Violences conjugales : à Nancy, les auteurs pris en charge dans un centre pour stopper la violence
Depuis octobre 2020, l'association Terres à Vivre à Nancy gère un centre de prise en charge des auteurs de violences conjugales (CPCA). Un dispositif qui permet un suivi psychothérapeutique et socio-éducatif des agresseurs, avec l'objectif de mettre fin aux comportements violents.
C'est une autre manière de lutter contre les violences conjugales : prendre en charge les auteurs de ces violences et entamer un long suivi de prise de conscience et de déconstruction du comportement violent. C'est, depuis octobre 2020, la mission du centre de prise en charge des auteurs de violences conjugales (CPCA) de Nancy, tenu par l'association Terres à vivre.
Voulus par le Grenelle sur les violences faites aux femmes de fin 2019, ces centres permettent d'articuler "la réponse judiciaire, sociale et éducative, ainsi que des réponses thérapeutiques" explique Elisabeth Perry psychologue, psychothérapeute et directrice du CPCA. Si à Nancy, environ 60% des auteurs de violence suivant ce dispositif le font dans le cadre d'une condamnation, le reste s'est rapproché de l'association de sa propre initiative ou à travers le tissu associatif.
"Ils peuvent nous appeler s'ils cherchent une prise en charge "spécialisée violence", parce qu'ils se sont fait peur, qu'ils ne veulent pas évoluer comme ça, ou via nos partenaires. D'autres nous contactent aussi après des premiers faits de violence" précise Elisabeth Perry.
"L'intérêt c'est de proposer, dans un travail de réseau, avec les associations qui s'occupent des victimes, un dispositif qui permet de prendre en charge l'auteur" estime Elisabeth Perry. "Nous ne mêlons pas de la décision de justice, poursuit la directrice, mais on travaille évidemment avec elle, elle regarde bien la situation, l'état de la victime et prendra sa décision en fonction de cela".
Eviter la récidive ou le passage à l'acte
L'action du CPCA se fait donc en concertation et constitue un maillon de cette chaîne. Une action qui prend la forme d'un suivi avec des psychologues, des psychothérapeutes et des bénévoles. Stéphanie Serra, lieutenant colonel de gendarmerie, intervient personnellement et bénévolement dans l'association Terres à Vivre. Elle a également rédigé un mémoire de recherche sur les auteurs de violences conjugales.
"Avant que la violence ne s'exerce, beaucoup de mécanismes entrent en jeu, comme la compréhension de ses émotions et de ses réactions, la gestion de ce qui se passe en soi" explique Stéphanie Serrat, pour qui l'objectif est de "donner des outils de connaissance de soi et de ces mécanismes, pour avoir ensuite des alternatives à ces réactions violentes pour vivre différemment les situations et ne pas utiliser la violence comme réponse."
Je ne suis évidemment pas fier de ce que j'ai fait, mais j'arrive à en parler - Alexandre, responsable de violences conjugales
Alexandre a commis des violences conjugales et suit ce dispositif depuis plusieurs mois, une prise en charge "inévitable si l'on veut s'en sortir" selon lui. Lui a pris conscience de ses actes et travaille dessus grâce à l'association : "il faut savoir mettre les mots et pouvoir les mettre. Aujourd'hui je ne dédramatise plus les choses, je ne suis évidemment pas fier de ce que j'ai fait, mais j'arrive à en parler et à en guérir surtout, pour guérir aussi mon entourage".
Un long travail de compréhension et de déconstruction nécessaire, que comprend Laetitia. Dans une affaire différente de celle d'Alexandre, elle a été victime de violences conjugales : "C'est important d'entendre aussi les auteurs parce qu'on ne peut pas aider les victimes sans comprendre ce que l'auteur vit. "Pourquoi est-il violent ?" "Pourquoi la victime reste avec lui?" C'est un mécanisme et l'un ne va pas sans l'autre. Pour pouvoir aider la victime il faut pouvoir aider l'auteur."
La ministre Elisabeth Moreno rencontre les associations
Lors de sa visite à Nancy ce mercredi, Élisabeth Moreno, ministre déléguée chargée de l'Égalité entre les femmes et les hommes, a rencontré les représentants des associations Réalise et Terres à Vivre, et signé une convention pour la prise en charge des auteurs de violences conjugales.
Les femmes victimes de violences ou les témoins peuvent contacter le 39 19, numéro accessible gratuitement, 24h sur 24h.